Cette école d’été s’est tenue à l’Université de Lausanne (UNIL) du 5 au 7 juin 2024.
Par Roxane Borgeaud
Le début de période estivale marque la fin des cours pour une partie de la communauté UNIL, tout comme la possibilité de continuer à développer et nourrir ses compétences ! Le Gamelab UNIL-EPFL, dans le cadre des summer schools proposées par l’Université de Lausanne, a mis sur pied pour la première fois cette année une école d’été visant à familiariser les participant·e·s aux enjeux, outils et méthodes de la ludification des contenus en médiation scientifique. Destinée aux doctorant·e·s et étudiant·e·s en Master, cette première édition fut également l’occasion de faire se rencontrer des spécialistes provenant d’horizons divers.
Mêlant à la fois théorie et pratique, le programme concocté par Isaac Pante, David Javet et Yannick Rochat a permis à seize personnes de bénéficier des interventions de plusieurs expert·e·s gravitant dans les milieux de la conception et de la transmission de contenus culturels et scientifiques, en contexte académique comme en dehors. Ceci, tout en se familiarisant durant ces trois jours avec les outils indispensables à la création de contenus ludiques.
Journée 1 : Théorie et pratique du game design
Un accueil autour d’un café, suivi d’une présentation de quelques exemples de jeux pensés pour la médiation, ont ponctué la première matinée. Plusieurs étudiant·e·s ont ainsi présenté leurs créations (dont certaines ont été primées lors des Swiss Games Awards 2022 et 2023) conceptualisées et développées durant le cours « Développement de jeux vidéo 2D » d’Isaac Pante (maître d’enseignement et de recherche en section des sciences du langage et de l’information). Chronociné (Théo Rochat), Le Procès de Catherine Quicquat (Chloé Luthier), Vote Now! (Joël Rimaz), Fix it! (co-développé par Amina Matt et Mélissa Matti) et Lausanne 1830: Histoires de Registres (Saara Jones) ont pu par la suite être pris en main par les participant·e·s, ce avec les apports et anecdotes de leurs développeurs et développeuses. Cette entrée en matière a également permis de se familiariser avec des outils tels que Kaboom, Bitsy et Twine, mis en avant tout au long de cette école d’été.
Saara Jones et Lausanne 1830, jeu développé avec l’encadrement du studio Digital Kingdom
L’après-midi fut l’occasion d’entrer dans les prémices de la conception de jeux, avec un atelier de game design dispensé par Sandro Dall’Aglio, du studio suisse Digital Kingdom. Au travers du jeu de cartes Love Letter, les participant·e·s, répartis en plusieurs groupes, ont pu se familiariser avec ses mécaniques sous-jacentes, puis dans un second temps s’essayer à la création de cartes supplémentaires. Un exercice à la fois ludique et créatif, dans une ambiance conviviale, qui a également permis de faire plus amplement connaissance.
Cette première journée s’est ponctuée par la présentation des objectifs d’un document de game design par David Javet (premier assistant en section d’histoire et esthétique du cinéma), outil indispensable à tout développement de jeu. Mettant l’accent sur les objectifs de ce dernier ainsi que le contenu à transmettre, cette présentation a également conduit à conceptualiser les mécanismes sous-tendant tout jeu, que celui-ci soit sous forme numérique (jeu vidéo, fiction interactive, etc.) ou physique (jeu de plateau, de cartes, etc.). Dans la continuité de l’exercice précédent, un exemple est venu ponctuer la présentation avec Daybreak, jeu de plateau inventif et coopératif visant à lutter contre les causes du réchauffement climatique.
Journée 2 : Théorie et pratique du développement de jeu vidéo
Stéphanie Mader (maître de conférences au CNAM, enseignante et responsable de la spécialisation Game Design à l’ENJMIN) a ouvert cette seconde journée avec une présentation sur les enjeux du game design dans les jeux vidéo. Au travers de la focale « d’expérience immersive », Stéphanie a pu apporter une expérience riche quant à ce qu’est un jeu et ce que ce dernier est amené à faire vivre et ressentir aux joueurs et joueuses. Transposer une expérience implique ainsi de prendre en considération le nécessaire équilibre entre ludification et simulation, tout en délivrant le contenu dans un cadre de médiation scientifique.
La suite du programme, en compagnie de Marion Bareil (co-fondatrice de Tourmaline Studio et enseignante à la HEAD), a consisté en la découverte de ce que permettent des outils tels que Bitsy et Twine. Faciles et intuitifs à prendre en main, ils ont permis aux participant·e·s de suivre pas à pas les premières étapes de création et d’entrevoir la diversité des possibilités offertes par ces outils.
Dans un esprit similaire, la première moitié d’après-midi a été consacrée à une présentation d’Isaac Pante sur une sélection de quelques moteurs de jeux parmi les plus adaptés pour réaliser un premier travail de création. Des outils tels que KAPLAY et Kaboom.js (employés notamment pour quelques-uns des jeux présentés lundi), Construct, mais aussi Ink, The Wick Editor et Ren’Py (taillés pour de la fiction interactive) ont ainsi été mis en avant.
La fin de cette seconde après-midi a été animée par Mélissa Corboz, alumna de l’UNIL en humanités numériques. Elle est venue nous présenter son quotidien en tant que quality analyst (QA). Maillons indispensables du développement de jeux vidéo fonctionnant de pair avec les équipes de testeurs et développeurs, les QA ont pour tâche d’améliorer la qualité des processus des jeux dont ils ont la charge. Un exercice participatif avec la classe a clos la présentation, amenant les participant·e·s à débusquer des logiques perfectibles dans un jeu fictif en cours de développement.
La soirée de cette deuxième journée a été l’occasion de se retrouver et d’échanger dans un cadre un peu plus informel au Perchoir, bar situé au sommet du bâtiment Vortex. Malgré une météo maussade, ce fut l’occasion d’un moment de détente en commun, tout en profitant de la vue (et des délicieuses pizzas !) qu’offrent les lieux.
Journée 3 : Théorie et enjeux de la médiation scientifique au travers de dispositifs ludiques
La matinée de cette dernière journée fut consacrée à trois présentations, dont la première a mis en avant le Studio Sémaphore et le travail de Caterina Martini (qui a participé aux trois jours de l’école d’été). Divers jeux du studio – Medbay-418, développé sur mandat de la ville de Genève, ainsi que L’Incendie du Bas Creux, qui est lui le fruit d’un partenariat avec la ville de Nyon – ont été présentés, en abordant dans chaque cas leur contexte de développement et les difficultés rencontrées (ou non).
Jessica Friedling du studio Ta-Daaa est venue ensuite parler du développement d’Equilibrium. Jeu développé en collaboration avec Tourmaline Studio et visant à être présenté durant la Cité des Métiers, cette étude de cas a ici aussi permis de mettre en avant les contraintes et éléments devant être pris en compte tout au long du processus de création d’un objet visant à présenter des contenus scientifiques.
Gilbert Greub, professeur ordinaire (UNIL) ainsi que chef du service de microbiologie du CHUV, est venu présenter les jeux de cartes Krobs et MyKrobs afin de conclure cette troisième et dernière journée de présentations. Destiné dans sa première version au grand public et dans sa seconde aux étudiant·e·s de propédeutique en médecine, ces deux créations visent à informer sur les moyens de transmission des agents pathogènes courants, mais aussi sur l’existence de bactéries bénéfiques (par ex. cyanobactéries). Un jeu intuitif et facile à prendre en main, démontrant ici un bel exemple de médiation scientifique rendue accessible à un large public.
L’après-midi a été consacrée à une visite guidée du Musée Suisse du Jeu par Selim Krichane (Directeur du musée). À travers cette exposition, nous avons eu l’occasion d’examiner les enjeux de médiation concernant la transmission, les installations, les défis rencontrés et les publics visés. La journée s’est clôturée avec un moment de détente, amenant les participant·e·s à découvrir de manière plus détaillée l’exposition en cours (« De la case au pixel », jusqu’au 6 janvier 2025), suivi d’un verre en terrasse : l’occasion d’admirer la vue et le lac présent juste devant les portes du musée.